1° La fondation du monastère de Paray-le-Monial : le Comte Lambert
guillaume le pieux

Lettrine enluminée
représentant Guillaume Le Pieux

  • D’après les rares textes qui nous sont parvenus, le monastère fut fondé en 973 par le comte de Chalon, Lambert.
  • Lambert, issu d'une famille noble mais assez modeste, était devenu vers 950, comte héréditaire de Chalon et avait réussi à constituer une vaste principauté en ajoutant à son comté, l'Autunois et le Charolais. Sur la fin de sa vie, il souhaita fonder un monastère qui deviendrait le sanctuaire de sa famille et sollicita l'avis de Maieul, abbé de Cluny, qui lui conseilla un site nommé Orval (Aurea Vallis), dominant une vallée broussailleuse, dans le sud du Charolais. Comme les fouilles récentes l'ont montré, il s'agit d'un site ancien, probablement d'origine romaine, près d'une ancienne «villa» et à proximité d'un «temple très ancien».
  • Les travaux de construction furent menés avec rapidité puisque la consécration d'une première église (Paray I)* eut lieu en 977, en présence du fondateur, de sa famille, de trois évêques et d'une multitude de prêtres, moines et laïcs. Elle fut placée sous le vocable du Saint Sauveur, de la Vierge Marie et de saint Jean Baptiste. Le nouveau monastère suivait la règle de Saint Benoît mais ne fut pas rattaché à l'ordre de Cluny. Pour assurer la subsistance des moines, il fut doté de grands biens par le comte et sa famille. Enfin, pour assurer la renommée de la nouvelle fondation et attirer les pèlerins, Lambert n'hésita pas à transférer à Paray, malgré l'opposition du clergé et de la population, les reliques de saint Grat, ancien évêque de Chalon sur Saône, qui était l'objet d'une grande vénération dans cette ville. Plus tard, le monastère reçut aussi des reliques de Saint Blaise : cette tentative de créer à Paray un centre de pèlerinage important ne réussit pas puisque rien n'indique que l'église de Paray ait été l'objet d'une fréquentation populaire particulière au Moyen Age.

* Par commodité, et par référence à Cluny, on prend peu à peu l'habitude d'adopter les références Paray I, Paray II et Paray III pour nommer les églises construites sur le site. Des restes de cette première église ont probablement été découverts lors des fouilles conduites par Gilles Rollier.

2° Le rattachement à Cluny
  • Le 5 mai 999, au monastère de saint Marcel-les-Chalon, le fils de Lambert, Hugues, comte de Chalon et évêque d'Auxerre, fit don de Paray-le-Monial à l'abbé de Cluny lors d'une grande cérémonie, en présence de témoins considérables : le roi de France en personne, plusieurs seigneurs d'importance dont le duc de Bourgogne, trois évêques.
  • Le rattachement de Paray-le-Monial à "l'ordre" de Cluny eut des conséquences considérables pour le prieuré et la petite ville qui se développa rapidement dans son orbite. Sous l'impulsion de l'Abbé Odilon, des travaux de construction d'une nouvelle église (Paray II) furent entrepris : les fouilles conduites entre 1998 et 2003 par Gilles Rollier ont permis d'en confirmer la présence et d'en reconstituer le plan.
  • La consécration de l'autel de cette église a probablement eu lieu, selon l'historien bourguignon du XVIIIème siècle, COURTEPEE, en 1004.
  • A la fin du XIème siècle, vers 1075/1080, cette église fut dotée du porche actuel, nécessaire à la pratique de la liturgie clunisienne liée au culte des morts, spécifique à l'ordre de Cluny et dont l'abbé Odilon fut le promoteur.
chapelle haute vue nordchapelle haute vue sud

Chapelle Haute vue du nord                                    Chapelle Haute vue du sud

 

3° La construction de l'église actuelle : Hugues de Semur
saint hugues

Vitrail représentant
saint Hugues- Basilique

  • Il est maintenant établi par la majorité des spécialistes, que la construction de la basilique actuelle (dite Paray III), est due au grand abbé de Cluny, Hugues de Semur.
  • Originaire de la ville voisine de Semur-en-Brionnais, située à vingt cinq kilomètre de Paray, Hugues de Semur appartenait à la famille du comte Lambert. Il était en outre le filleul du comte-évêque Hugues, son fils, qui avait donné le monastère à Cluny. Dans les textes généralement considérés comme son testament, il raconte comment son parrain avait sauvé son âme en le faisant entrer très jeune comme moine à Saint Marcel-les-Chalon puis à Cluny, ou il accomplit une carrière prodigieuse. Il fut élu abbé en 1049, à vingt quatre ans, et le demeura 60 ans, jusqu'à sa mort en 1109. Il joua un rôle très important dans la vie politique européenne de son temps, arbitrant les conflits entre les souverains, et bénéficia d'une autorité morale probablement supérieure à celle du pape.
  • C'est donc en mémoire de son oncle et parrain, qui était à l'origine de son éclatante destinée, qu'Hugues de Semur aurait décidé la construction d'une grande église à Paray-le-Monial, en témoignage de reconnaissance.
  • Le projet, initié par Saint Hugues, probablement conduit sur place par un de ses amis, le prieur de Paray, Hugues de Busseuil, fut très long à réaliser, probablement en raison des troubles et de la sévère crise financière que connu l'ordre de Cluny dans le courant du XIIème siècle. Les études archéologiques montrent que les travaux se poursuivirent jusqu'au début du XIIIème siècle. C'est probablement pour des raisons d'économie que l'on se décida de les abréger sans réaliser le plan initial d'une nef à cinq travées et à conserver l'ancien porche, malgré les difficultés rencontrées pour le raccorder au nouvel édifice, puisqu'il n'est pas dans l'axe de la nouvelle nef.

 

4° Heurs et malheurs d'un monastère clunisien
millesime

Millésime décoré 
de volutes végétalisées

escalier

Escalier sur trompe - Cloître

  • Dans les années qui suivirent la construction de l’église, le prieuré de Paray connut semble-t-il une existence paisible et prospère dont nous avons une idée au travers des rapports de visites régulièrement effectués par l’ordre de Cluny. L'effectif se maintient aux alentours de vingt moines, jusqu’au XIVème siècle période ou survient un changement capital.
  • En effet, l'abbé de Cluny obtient du pape en 1344, l'autorisation de prendre personnellement le titre de prieur, tandis qu'il était représenté sur place par un doyen, qui ne possédait plus les mêmes pouvoirs, ni la même autorité. Les premiers signes de déclin ne tardent donc pas à apparaître et les rapports de visites s'en font l'écho : bâtiments mal entretenus, aumônes en baisse etc.
  • Les guerres franco-bourguignonnes, puis les guerres de religion laissèrent aussi leurs séquelles. Aux XVIème, XVIIème siècles, le monastère de Paray suit le long déclin de l'ordre de Cluny. L'effectif des moines descend au dessous de la dizaine et leur vie dissolue défraie quelquefois la chronique locale.
  • Au début du XVIIIème se produit une ultime tentative pour réformer l'ordre de Cluny qui se traduisit à Paray par d'importants travaux de réparation de l'église et surtout la construction entre 1702 et 1750, d'un nouveau bâtiment monastique, le prieuré actuel.
  • La révolution française provoqua la fin des ordres monastiques et par conséquent celle de l'ordre de Cluny. Le gouvernement songea évidemment très vite à récupérer les immenses biens du clergé pour faire face à la crise financière héritée de la monarchie. Très tôt, le conseil municipal de Paray, pourtant composé d'ardents révolutionnaires, eut l'idée d'acheter le monastère et son église.
  • Le vaste bâtiment du prieuré permettrait de disposer de locaux pour les écoles et l'église des moines remplacerait avantageusement l'église paroissiale Saint Nicolas, trop petite. La ville se rendit propriétaire des lieux en décembre 1791, lors d'une vente aux enchères à la bougie à Charolles. Pendant la Terreur, l'église perdit son clocher, puis servit à divers usages, entrepôt de fourrages, de vin, écuries etc, ce qui provoqua de nombreuses dégradations.

 

 

 

 

 

5° La Basilique et le culte du sacré Cœur
sainte marguerite

Vitrail de Sainte Marguerite
Chapelle rayonnante

  • Si la Basilique de Paray-le-Monial est aussi connue et visitée de nos jours, elle le doit pour une bonne part au fait qu’elle est maintenant dédiée au culte du Sacré-Cœur et utilisée dans le cadre des pèlerinages.
  • Il n'est pas besoin de rappeler ici l'histoire du culte du Sacré Cœur né dans le monastère voisin de la Visitation. Dès avant la mort de Marguerite Marie et immédiatement après celle-ci, un début de pèlerinage prit immédiatement naissance auprès de ses restes et se développa au cours des siècles suivants. En 1864 et 1865 eurent lieu à Paray, devant une grande affluence, les cérémonies de béatification de Marguerite Marie tandis que le pape Pie X étendait le culte du sacré Cœur à l’Eglise universelle.
  • Mais le pèlerinage de Paray proprement dit, fut créé en 1873 par le père DREVON, un jésuite, dans le climat si particulier qui suivit la défaite de 1871. Le père DREVON avait remarqué qu'il était facile de gagner Paray-le-Monial suite à la présence d’une gare de chemin de fer. De plus la ville était dotée d'une grande église paroissiale, qui permettrait d'accueillir des foules importantes, la chapelle du monastère de la Visitation se révélant trop petite pour accueillir la foule.
  • En conséquence, en 1875, le pape éleva l’église paroissiale de Paray-le-Monial au rang de basilique mineure et en changea la dédicace : elle fut désormais consacrée au Sacré Cœur et c’est sous ce vocable qu’elle est aujourd’hui universellement connue.